« Les agriculteurs peuvent économiser du temps »

Face aux contraintes liées à leur labeur, les agriculteurs imaginent des solutions pour réduire leur charge de travail. Réunir leurs moyens, échanger leurs terrains respectifs : autant de techniques pour améliorer leur quotidien.

Eric Rolland utilise Avitouchun système centralisant la gestion de ses poulaillers.

Eric Rolland utilise Avitouch, un système centralisant la gestion de l’eau, l’électricité et la luminosité dans ses poulaillers. © Photo Yann Le Ny

  • Les GAEC : se regrouper pour économiser

Alors que le métier s’est longtemps résumé à des exploitations familiales, les Groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) viennent changer ce mode de fonctionnement. Plusieurs agriculteurs y réunissent du matériel et leurs ressources. Elles leurs permettent de réduire leur temps de travail en se remplaçant à tour de rôle. Grâce à cette organisation, les fermiers peuvent prévoir de partir en vacances sans avoir recours à un employé.

Gildas Guyomar est maraîcher à Camlez. Depuis qu’il est en GAEC, cet exploitant agricole a augmenté sa production tout en travaillant autant. « On peut se prendre une semaine de vacances par an avec ma femme. Je la prenais déjà avant la mise en place du groupement. Ça a augmenté notre efficacité. Avec le temps que ça m’a fait gagner, je peux m’occuper d’autres tâches dans notre ferme ».

  • Les fermes connectées : la technologie au service de l’agriculture

Connecter sa ferme est une solution de plus en plus envisagée par les agriculteurs. À l’heure où la domotique prend de l’importance, les agriculteurs veulent économiser du temps en gérant toute leur exploitation en un seul clic.

Mais cette automatisation a un coût. Certains agriculteurs sont obligés de s’endetter pour avoir leur ferme connectée. Gagner en rentabilité peut parfois faire crouler les exploitations sous les factures. « Beaucoup d’agriculteurs ont cru que la technologie allait tout régler. Ils ont marché dedans à fond en achetant toutes les machines possibles. Il y a un gain de temps, mais l’agriculteur devient dépendant de cette technologie », affirme Joseph Cabaret, agriculteur à Hillion.

  • L’échange parcellaire : éviter les longues distances

Pour baisser le temps de trajet, plusieurs agriculteurs ont décidés d’échanger leurs parcelles trop distantes de l’exploitation. Selon Didier Debroize, ingénieur machiniste à la Chambre d’agriculture de Bretagne, l’échange parcellaire sert une organisation scientifique du travail. « En concentrant leurs champs à de faibles distances de l’exploitation, les agriculteurs peuvent économiser du temps et de l’argent. Ils peuvent donc se concentrer sur d’autres tâches ».

Pourtant, ces échanges sont difficiles à mettre en place, même si les agriculteurs sont d’accord sur le principe. « Le problème, c’est l’attachement personnel qu’ont les agriculteurs à ces parcelles. Elles appartiennent parfois à la famille depuis trois ou quatre générations. Ça serait renoncer aux terres des ancêtres… », affirme Éric Rolland, volailler à Ploulec’h. À ces problèmes s’ajoutent parfois les différences de taille des parcelles ou la qualité de la terre de celles-ci.

Pour encourager les échanges, des groupes sont créés par la Chambre d’agriculture de Bretagne et différentes communes. « Les agriculteurs participants trouvent des accords. La discussion nous permet d’avancer plus vite car on leur montre les avantages financiers », décrypte Didier Debroize.

  • TCS : arrêter le travail de la terre

Les Techniques culturales simplifiées (TCS) visent l’arrêt du labour et à “laisser faire” la nature. D’après la Chambre d’agriculture en Bretagne, près de 24% des parcelles fonctionnent avec ce système : moins de machines, moins de carburant consommé et surtout plus de temps économisé. « Quand, les agriculteurs arrêtent de labourer, l’effet immédiat est un gain de temps et donc d’argent. Le deuxième, c’est l’amélioration de la qualité des sols », explique Djilali Heddadj, expert agronome à la Chambre d’agriculture de Bretagne. Sans les labours, un écosystème complet peut être recréé dans les champs. Ajouté à une présence continuelle de végétaux, cela permet d’éviter l’érosion des sols. Ces derniers sont plus fertiles et l’agriculteur n’a plus à épandre du lisier.

Le point négatif de ces techniques est la recrudescence des mauvaises herbes. Pour lutter contre elles, certains agriculteurs utilisent des phytosanitaires tandis que d’autres implantent des couverts végétaux pour éviter d’avoir les sols à nu.

Une autre TCS est le semi direct. Il permet de réduire jusqu’à ⅔ la charge de travail de l’agriculteur. Le semi direct consiste à semer alors que des plantes sont encore présentes dans le champ. Elles ont ainsi la capacité de repousser des parasites tout en laissant la nouvelle culture se développer. Après avoir économisé le labour, l’épandage de pesticides et de fertilisants n’est donc plus nécessaire.

Étienne Bracq & Yann Le Ny.